Interview Le coup de pouce de Pierrick pour relancer la biodiversité au jardin et dans votre commune

Pierrick Doré, de Saint-Maixant (Gironde), lance les premiers chantiers verts pédagogiques, à destination des municipalités et des particuliers, pour relancer la biodiversité.

Technique de tonte des herbes hautes du jardin, période de coupe manuelle des espaces verts... Pierrick Doré divulgue ses conseils pour accueillir et favoriser la biodiversité, à l'occasion de chantiers verts ouverts à tous.
Technique de tonte des herbes hautes du jardin, période de coupe manuelle des espaces verts… Pierrick Doré divulgue ses conseils pour accueillir et favoriser la biodiversité, à l’occasion de chantiers verts ouverts à tous. (©Pixabay)
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Pierrick Doré, de Saint-Maixant (Gironde), lance les premiers chantiers verts pédagogiques, à destination des municipalités et des particuliers, pour relancer la biodiversité au jardin ou dans les espaces verts publics. Il explique sa démarche à GILO Nature (pour Le Républicain / Actu.fr) et dévoile quelques astuces pour favoriser le retour des oiseaux, insectes, fleurs sauvages… dans notre cadre de vie.

Actu : Qu’est-ce que vous appelez un chantier vert et en quoi ça consiste ?

Pierrick Doré : Un chantier vert, c'est apprendre à couper manuellement et correctement les hautes herbes laissées par une commune (ou dans son jardin) et découvrir des astuces et différentes méthodes afin d’accueillir et de relancer la biodiversité dans son environnement proche.

Qu'est-ce qui vous a motivé à proposer ces rendez-vous pédagogiques ?

P. D. : Cela fait plusieurs années que j’observe les municipalités faire des efforts mais, à chaque fois je constate la même maladresse, celle de couper et de souffler les feuilles avec des outils à moteurs, ce qui détruit en quelques heures la belle intention du début, en faveur de la nature.
Ainsi, chaque année à la même période, en raison de cette maladresse, la biodiversité accueillie au village durant la belle saison est détruite en quelques jours ou semaines. Et autre problème : cette façon d’agir favorise toujours la reproduction des mêmes espèces. Si bien que je me demande si cela n’est pas encore plus destructeur que de tondre régulièrement…

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Quel est le bon geste à adopter alors ?

P. D. : Dans l’idéal, il ne faudrait jamais couper entièrement une haie, ni tondre toute une pelouse, ni des centaines de mètres, ni des kilomètres linéaires comme le long d’une piste cyclable, ou sur une digue. Et il y a bien d’autres astuces encore…

C’est pour ces raisons que vous allez à la rencontre des municipalités et des habitants ?

P. D. : Oui, avec l’espoir que tout n’est pas perdu, j’ai décidé de proposer des balades, des conférences, des soirées à thème pour aller à la rencontre des populations, des associations locales, afin d’atteindre les employés de mairie chargés de l’environnement et des élus. L’objectif étant de mettre en avant la biodiversité de leur village, ce potentiel… Mon initiative est bien accueillie : le dialogue s’installe, puis la confiance, l’esprit d’amitié et la demande de conseils aussi.

Quels sont les premiers retours par rapport à votre démarche ?

P. D. : Je viens de proposer une première action à Saint-Macaire, en Gironde, en partenariat aussi avec une association, Vivre le patrimoine. La prochaine aura lieu le samedi 25 février 2023 (deux horaires, 10h et 14h). Les municipalités ont en charge de nombreux espaces verts et elles sont accessibles. Les associations sont moteurs, voir demandeuses de mettre en place ce type de démarche. J’espère également le proposer chez des particuliers, des petites structures privées, voire dans l’arrondissement de Langon (Gironde). J’aimerais aussi pouvoir atteindre certains grands services en charge d’espaces verts, le long de la Garonne, des pistes cyclables, des digues…

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Concrètement, comment se déroule un chantier vert ?

P. D. : Très simplement, on vient avec ses outils et ses protections. Il faut partir de l’extrémité de la zone à couper, puis on débroussaille et désherbe, tout en allant vers le centre de cette zone.
Après avoir coupé une petite zone, on déplace les végétaux avec les mains à l’arrière de soi avant de les déplacer sous une haie ou, de les stocker - soit sur une partie de la parcelle coupée, ou alors sur une parcelle voisine non coupée - pour ne pas faire trop voyager cette biodiversité qui est dans son milieu.

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Pourquoi cette végétation coupée est-elle stockée et dans quel but ?

P. D. : La végétation coupée sera en effet stockée proche de son emplacement d’origine, pendant encore quelques semaines voire quelques mois, selon la saison : à la fin de l’hiver pour laisser éclore le vivant en dormance, dès les premières chaleurs de fin d’hiver et au début du printemps.
Au printemps et l’été, une partie peut être laissée seulement quelques jours, et une autre plusieurs mois, car certaines espèces d’insectes ont seulement une génération par an et le cycle est donc plus long ; et à l’automne, l’ensemble doit être stocké durant tout l’hiver car la nature a déjà commencé son cycle de dormance hivernale.

Pierrick Doré est aussi passionné des oiseaux. Bénévole à la LPO Gironde, il organise des sorties sur ce thème en Sud-Gironde.
Pierrick Doré est aussi passionné des oiseaux. Bénévole à la LPO Gironde, il organise des sorties sur ce thème en Sud-Gironde. (©Jacques Gaye)

Pourquoi cette précaution de coupe manuelle est-elle si importante ? Racontez-nous un peu ce qui se passe dans ces herbes hautes

P. D. : En hiver, dans ces herbes hautes, il y a à la fois une biodiversité qui dort (œufs, cocons, chrysalides…) mais aussi une biodiversité active (vers de terre, larve de mollusque…) qui trouve une certaine nourriture, tout comme une protection contre le froid et des éventuels prédateurs hivernants comme les passereaux (rougegorge, troglodyte mignon, bergeronnette, pinson, fauvette…).
Il y a aussi des petits mammifères qui se sont installés au vu du garde-manger. Eux-mêmes prédatés par la présence de rapaces ou de hérons…
Au printemps et en été, cela est un peu différent : dans les herbes hautes, il y a une grande partie qui vit activement.
Donc en cas de coupe manuelle de végétaux, la biodiversité se déplacera à la recherche de plantes vivantes, vertes mais il y a toujours la possibilité d’avoir des œufs fraîchement pondus, d’où l’utilité de laisser stocker quelques jours les herbes pour laisser les œufs éclore et les larves quitter les herbes.

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Mais cela peut durer longtemps, vu que d’autres espèces risquent de pondre sur ces herbes coupées…

P. D. : C’est pourquoi il est important de jamais ramasser toute l’herbe coupée en même temps, le même jour. Laisser minimum six à huit semaines entre deux coupes pour laisser un cycle complet de : ponte, éclosion et croissance de la larve puis envol de l’adulte. Et ne jamais recouper exactement à la date de l’année précédente.

De quels outils a-t-on besoin et quels sont leurs atouts par rapport à une autre technique ?

P. D. : Les premiers outils sont tous simplement des cisailles de différentes tailles, pour couper l’herbe et les branches. Ensuite un râteau et une faux peuvent compléter. En utilisant ces types d’outils, on garde le vivant tout en libérant le sol pour un nouveau cycle.
Car le travail manuel est la seule technique qui permet de couper les végétaux (herbes sèches) sans détruire, nit écraser (véhicule lourd) ou tuer la biodiversité. Je préconise aussi de prendre des gants et un tissu pour poser ses genoux et se protéger du froid, l’humidité venant du sol.

Découvrez des oiseaux près de chez vous, Pierrick vous guide

- Dimanche 26 février

Balade à la rencontre des oiseaux hivernants à Beautiran, organisé par le groupe LPO Sud-Gironde. Départs : 9h30 et 14h30.

- En mars

Nous irons à la recherche, à la rencontre du pic noir et d'autres pics, sur différentes communes de Sud-Gironde (Virelade, Bernos-Beaulac, Le Nizan, Balizac...)

- En avril

Viendra le moment d'observer les oiseaux arrivants de la migration mais également les papillons, coléoptères, libellules... (à Sigalens, Brouqueyran, Bazas,...)

- 7 mai

À Auros journée du coteau de Monco, connu pour ses orchidées sauvages

- 8 mai

À Monségur (lundi de Pentecôte), fête de la nature à Beautiran

- Une journée est prévue également à La Réole avec des assos locales

Pierrick aimerait aussi mettre en place des journées nichoirs chez les particuliers et municipalités.

- Février 2024

À la médiathèque de Bazas, Pierrick a en projet de présenter le tichodrome échelette, ce bel oiseau aux ailes arrondies rappelant celles d'un papillon

Pierrick a l'habitude d'observer le tichodrome échelette à Bazas (33). Il a déjà animé plusieurs sorties - et d'autres à venir - pour faire découvrir au public cet oiseau.

L’objectif est d’aérer le sol. En quoi est-ce important pour la biodiversité ?

P. D. : Le fait d’aérer le sol permet de refaire un cycle complet de jeunes pousses de différentes fleurs naturelles qui accueilleront ensuite une biodiversité d’insectes, et leurs prédateurs comme les oiseaux, chauves-souris ou petits mammifères… Tout en préservant le vivant (cocons, chrysalides, larves, œufs…) qui sont en dormance dans ces grandes herbes sèches.

Et si l’homme n’intervient pas ?

P. D. : Si l’on n’intervient pas, c’est l’herbe qui s’installera, tout en étouffant cette biodiversité de fleurs naturelles présentes avant elle et cela donnera une biodiversité plus faible.

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Cette pratique peut-elle être reproduite au jardin ?

P. D. : Oui, c’est également l’une des motivations de cette initiative : donner des astuces, des clefs aux particuliers, afin de leur démontrer que c’est possible. Et aussi échanger, partager autour de leurs inquiétudes, leurs expériences et les aider à mettre en place certaines choses dans leur jardin, pour observer ce qui si passe. Moi-même je l’ai déjà expérimenté.

Avez-vous des chantiers verts prévus avec d’autres communes ?

P. D. : Oui, je suis en début de collaboration avec la mairie de Balizac pour la gestion d’une prairie humide. Beautiran aussi, où la commune laisse de belles parcelles en herbe et qui a un grand potentiel avec ces rouilles.
Puis, avec l’association La Boussole à Captieux, que j’ai rencontrée très récemment et qui a un terrain où elle voudrait mettre en place ce type de concept. Enfin, il y aura les coupes des autres parties laissées en friche dans la commune de Saint-Macaire (notamment le 25 février, lire plus haut).

Lors d'une visite à la découverte des oiseaux, en Sud-Gironde.
Lors d’une visite à la découverte des oiseaux, en Sud-Gironde. (©Jacques Gaye)

Vous proposez aussi d’autres animations et projets autour de la nature ?

P. D. : Oui, bien entendu (voir le détail dans l’encadré). Des sorties, conférences… J’espère que tout cela permettra l’organisation de soirées à thème sur la nature, avec des expos, des invités…
D’ailleurs, pour mettre en place tout cela, ou des animations ponctuelles, je suis à la recherche de personnes passionnées comme moi, sensibles à la nature, et qui peuvent trouver leur rôle dans toutes ces démarches, devenir acteurs. Il ne faut pas hésiter à me contacter ou à venir nous rejoindre, car nous ne serons jamais trop nombreux… !

Si vous souhaitez contacter Pierrick Doré, pour lui poser des questions, réserver votre place à une animation ou tout simplement parler de la nature avec lui, rien de plus simple : 06.03.35.85.83 ou [email protected] / Page Facebook : Accueillons la nature chez soi en Sud-Gironde.

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